Bastien Valensi (Cabaïa) : "Nous sommes les Rasta Rockett du retail ! "

Camille Boulate
Bastien Valensi (Cabaïa) :

Destiné à une carrière de tennisman, Bastien Valensi s'oriente finalement vers l'entrepreneuriat. D'abord en misant dans le déstockage de grandes marques, puis en créant Cabaïa. Avec ses sacs et autres accessoires, Bastien Valensi, à l'aide de son associé Emilien Foiret, a su séduire les consommateurs. Fortement digitale, l'enseigne se déploie désormais via des magasins physiques et mise sur des partenaires affiliés pour se développer.

En quelques années, les sacs Cabaïa ont fleuri un peu partout en France. La marque, née en 2015, séduit les consommateurs et affiche une croissance record, avec un chiffre d'affaires atteignant plus de 32 millions d'euros en 2022 (exercice fiscal clôturé en juin). L'année prochaine, Cabaïa table sur une activité dépassant les 55 millions d'euros. Les clés du succès ? L'audace de ses deux fondateurs, Emilien Foiret et Bastien Valensi. Pourtant, ils n'étaient pas, l'un comme l'autre, prédestinés à devenir entrepreneurs. Le premier était ingénieur nucléaire. Le second s'orientait vers une carrière de tennisman. "J'étais en sport-étude et je voulais devenir joueur professionnel. Mais, à 18 ans, je n'avais plus cette passion et j'ai compris que je ne gagnerais jamais Roland-Garros", se souvient Bastien Valensi. Naturellement, avec un père entrepreneur, Bastien Valensi est séduit par la voie entrepreneuriale. "Il ne m'a jamais poussé à me lancer. Pourtant, quand j'ai arrêté le tennis, c'était une évidence, explique le jeune homme, avant d'ajouter :

Je me suis mis à acheter des tshirts de grandes marques que je revendais sur Ebay. Cela a fonctionné et j'ai continué.

Bastien Valensi créé ainsi son entreprise mais peine à convaincre les banques. "Je me suis battu pour obtenir un prêt de 10 000 euros. Il fallait la caution des parents, des grands parents… Avec le recul, je n'avais aucune expérience et la banque me prenait de haut. J'ai pu obtenir l'aide du Réseau Entreprendre, ce qui m'a permis de me lancer", insiste-t-il.

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L'ingéniosité en étendard

Pendant 7 ans, Bastien Valensi évoluera dans le milieu du déstockage avant de revendre sa société. "Le secteur était devenu très concurrencé et les coûts d'acquisition chutaient. Je commençais à réfléchir à un autre projet", précise-t-il. Ce projet, c'était Cabaïa. En 2015, la marque fait parler d'elle grâce à ses bonnets aux pompons interchangeables. "On s'est aperçu que les consommateurs achetaient surtout en fonction de la marque, de son concept et des valeurs qu'elle porte, insiste Bastien Valensi, co-fondateur de Cabaïa, avant d'ajouter :

Nous voulions proposer une façon de consommer plus ingénieuse et plus durable, en facilitant le quotidien, le tout avec une vraie expérience client.

C'est avec cet ADN que Cabaïa se développe. D'abord en misant sur son "bar à bonnets".  Le premier corner Cabaïa voit le jour au centre commercial de Vélizy 2 il y a sept ans.

Le succès est au rendez-vous, tant en physique que sur Internet. Rapidement, les deux fondateurs choisissent de diversifier leur activité. "Nous n'avions pas conçu la marque pour être le leader du bonnet, s'amuse Bastien Valensi. Nous avons donc réfléchi à différents produits comme les chaussettes à boutonnière pour ne plus les perdre ou la serviette de plage avec une poche zippée." À chaque nouvelle gamme, l'enseigne a à cœur d'ajouter une ingéniosité pour rendre le produit le plus pratique possible aux yeux des consommateurs. Et donc indispensable. "Nous ne voulions pas lancer les mêmes produits que les autres", insiste Bastien Valensi.

Cultiver la différence

Une différence que les deux associés ont voulu cultiver. En 2019, quatre ans après le lancement de la marque, Bastien Valensi et Emilien Foiret veulent concevoir un nouveau produit et y impliquent, cette fois-ci, leurs clients. Le but ? Répondre au plus près à leurs attentes. "Nous avions plusieurs projets dans les tiroirs (bijoux, sac, casquette…) et nous leurs avons présenté. Ils ont été unanimes sur le fait qu'ils voulaient un sac joli et pratique. On a réfléchi à ce que nous pouvions apporter de plus. C'est là que l'idée de le customiser avec des pochettes interchangeables est née, détaille Bastien Valensi, avant d'ajouter :

On l'a présenté à nos clients et ils ont adoré. Depuis, on ne lance pas un produit sans avoir, au préalable, demandé leur avis. C'est essentiel car ils peuvent remonter de très bonnes idées.

Depuis la création de la marque, plus de 2,1 millions d'accessoires ont été vendus, dont au moins 60 000 sacs à dos. Un succès incontestable pour Cabaïa.

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La transparence avant tout

Pour autant, la marque fait face à de nombreux défis, notamment celui de faire conjuguer qualité des produits et prix accessible. La question de produire en France s'est évidemment posée pour la marque qui confectionnait, jusqu'ici, l'ensemble de ses produits en Europe. "Mais quand nous avons lancé la maroquinerie, on s'est vite rendu compte que l'équation économique n'était pas tenable. Pour le même produit, à qualité équivalente, j'aurais dû vendre mes sacs à 240 euros pièces, contre 90 euros aujourd'hui. Cela change totalement la cible de client, remarque Bastien Valensi avant d'ajouter :

Notre crédo est simple : ce n'est pas parce que nous produisons en Chine que nous ne pouvons pas être écoresponsable.

Ainsi, les deux co-fondateurs ont eu à cœur de choisir leurs partenaires et surtout de minimiser au maximum leur empreinte écologique en misant sur le transport maritime. Résultat : le transport ne représente que 5 % de leurs émissions de CO2. "Forcément, fabriquer en Chine n'est pas un choix que nous voulions faire. Mais nous n'avons pas eu d'autres alternatives", assure Bastien Valensi. Pour Cabaïa, le défi est d'aussi pouvoir répondre à la demande. L'enseigne entend fabriquer 1 million de sacs en 2023. "Cela serait impossible en France ou même en Europe", souligne-t-il. Pour l'entrepreneur, le tout est d'être transparent, tant auprès des clients que des salariés.

Nous n'avons aucun sujet tabou. Tout est public. Et chaque semaine, nos salariés sont au courant de tous les résultats de l'entreprise. Cette transparence est hyper importante.

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Faire preuve d'ambition

Aux futurs porteurs de projet, Bastien Valensi conseille une chose : n'ayez pas peur de votre ambition "Je vois souvent des entrepreneurs qui ont un gros manque de confiance en eux car ils n'ont pas fait de grandes études ou qu'ils n'ont pas beaucoup d'argent pour se lancer, insiste-t-il avant de préciser :

Il faut absolument sortir de ce complexe. Pas besoin d'avoir fait une grande école pour monter sa boîte. Il suffit simplement d'avoir de l'ambition et de se donner les moyens !

Et Bastien Valensi sait de quoi il parle. Il le confie lui-même : "Je n'ai pas fait HEC et je ne viens pas d'un milieu où, sur le papier, les gens réussissent. Idem pour mon associé. On ne croyait pas forcément en notre projet." Cette défiance, les deux entrepreneurs en ont fait une force qu'ils transmettent à leurs 100 salariés. "On a tendance à leur dire que l'on ne ressemble à personne. Nous sommes les Rasta Rockett du retail !"

Garder la tête froide

Face à l'engouement des consommateurs, Cabaïa a fait le choix de se développer via des boutiques physiques et non plus uniquement via son site marchand, un réseau de revendeurs ou encore des pop-up stores. À date, Cabaïa compte une petite quinzaine de boutiques, toutes en succursales et implantées principalement dans des grandes villes. L'enseigne souhaite toutefois étoffer son maillage, notamment sur des villes moyennes en s'appuyant sur des franchisés. Bastien Valensi souligne ainsi :

C'est un moyen d'aller plus vite dans le développement. Car on n'a clairement pas la même expertise sur ce type d'emplacement. Le franchisé connaît parfaitement sa zone et le tissu local.

Cabaïa entend toutefois prendre le temps avant de sélectionner ses premiers partenaires et ne fait pas la course à l'ouverture. Au contraire. "On veut des franchisés qui partagent nos valeurs. On ne veut surtout pas que l'expérience client soit différente parce que la boutique est tenue par un franchisé", souligne l'entrepreneur. Quoiqu'il en soit, le succès est au rendez-vous, tant auprès des clients que des futurs porteurs de projets, de plus en plus nombreux à solliciter l'enseigne. Et quand on interroge Bastien Valensi sur la façon de gérer cet engouement, sa réponse est sans appel : "L'entourage, tout simplement. Savoir s'entourer est d'ailleurs la clé. Un entrepreneur doit pouvoir agréger du monde autour de lui et former une équipe pour garder la tête froide, confie-t-il, avant de conclure : Il ne faut pas non plus avoir peur de la croissance et du succès. Si vous avez peur, arrêtez tout !"

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