Lors de sa traditionnelle conférence de presse, la fédération Procos a dressé le bilan de l'activité pour 2022. Résultat : l'année se termine mieux qu'elle n'a commencé. Mais les acteurs du commerce spécialisé restent très attentifs au contexte économique, marqué par la hausse des prix.
Une année 2022 en demi-teinte. C'est le constat dressé par la fédération Procos lors de sa traditionnelle conférence de presse. Très marqué par les fermetures et autres restrictions liées au Covid-19, le secteur du commerce spécialisé retrouve des couleurs. Ainsi, en 2022, l'activité en magasin repart légèrement à la hausse (+1,3 % par rapport à 2019, +14,7 % vs 2021) en matière de chiffre d'affaires. "Enfin une année durant laquelle les magasins sont ouverts en permanence ! La fin de l'année a été nettement meilleure que le début après un mauvais mois de janvier (-11,7 % par rapport à janvier 2019), souligne Procos, avant d'ajouter :
L'été fut très médiocre, inférieur à 2019, et enfin, l'activité s'est améliorée à partir de la rentrée pour se terminer sur un bon mois de décembre.
En effet, le dernier mois de l'année 2022 enregistre une augmentation de 10,4 % de son activité en magasin par rapport à la même période en 2019. "Par rapport à décembre 2021, les ventes en magasin sont en croissance de 6,5 % en moyenne. Seul le secteur cadeaux-jouets reste légèrement en retrait par rapport à 2021 (-0,9 %)", détaille Procos. Les ventes du marché de la beauté-santé ont, quant à elles, été très soutenues, "signe d'un certain retour à la vie sociale, aux sortie et aux plaisirs", insiste la fédération.
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L'équipement de la maison maintient son dynamisme
De manière globale, l'activité semble positive. Malgré ce dynamisme retrouvé, la situation est loin d'être homogène d'un secteur à l'autre. Les acteurs du commerce spécialisé ont dû composer avec la guerre en Ukraine et les inflations de prix qui ont suivies. Procos analyse :
L'importante hausse des prix des produits alimentaires (plus de 12 % sur l'année) a fortement impacté le pouvoir d'achat en particulier à partir d'octobre, mois qui marque le début des baisses des ventes en volumes des produits alimentaires, situation inédite depuis très longtemps.
Dans le détail, certains pans de marché ont retrouvé leur niveau de performances d'avant-Covid, quand d'autres peinent à renouer avec la croissance. L'alimentaire spécialisé, par exemple, conserve son dynamisme avec une hausse de 15,5 % des ventes rien que sur le mois de décembre 2022. Autre exemple, celui de l'équipement de la maison qui se maintient, avec une activité en magasin supérieure de 5,5 % par rapport à 2019, malgré deux années très dynamiques. Pour autant, "des contractions de certains marchés sont notables par suite de taux d'équipement très élevé et une activité qui reste sensiblement supérieures à celles de 2019", insiste Procos. Dans le détail, le segment du bricolage chute de 5 % par rapport à l'avant Covid, après deux années de hausses (+13 % en 2020 et + 6 % en 2021). La fédération souligne :
La première partie de l'année 2022 a été mauvaise mais le second semestre a été dynamique, soutenu par le marché du chauffage et de l'isolation.
Le marché de la jardinerie, quant à lui, voit son activité baisser par rapport à 2021 (-10 %) mais reste en hausse de 9 % par rapport 2019.
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L'habillement toujours en chute libre
Le marché de la beauté-santé, outre un très bon mois de décembre, performe également et affiche des résultats supérieurs à 2019. "Si l'on excepte les mois d'octobre et le pic de février, chaque mois est marqué par un retour progressif vers les ventes de 2019 avec beaucoup plus de régularité", précise Procos. Et la fédération ajoute :
Notons que le marché de la parfumerie est à +15 % par rapport à 2021 en valeur et à +8 % en volume.
En revanche, sans surprise, le marché de l'habillement est en souffrance. Après la liquidation judiciaire de Camaïeu fin 2022, c'est au tour des enseignes Kookaï, Pimkie ou encore André d'annoncer leur placement en redressement judiciaire. "Le marché de l'habillement reste en profond mouvement. Un marché qui a particulièrement perdu de sa valeur (baisse de 7 % entre 2019 et 2022 selon l'IFM). Les deux périodes de soldes n'ont pas été dynamiques, de même que le Black Friday", souligne Procos.
En 2022, comme le notait l'Alliance du Commerce, le marché a tout de même enregistré une bonne nouvelle puisque le panier moyen a augmenté de de 11 %. Malgré tout, le secteur reste en grandes difficultés et voit son activité en magasins baisser de 9,7 % par rapport à 2019. "L'analyse de la répartition des enseignes met en avant de grandes différences", alerte Procos. La fédération analyse ainsi :
40 % des enseignes ont des ventes 2022 supérieures à celles de 2019 alors que 60 % restent en dessous.
Enfin, comme nous l'évoquions à la publication du baromètre BPCE Digital & Payment, la restauration et les achats plaisir des Français ont conservé leur dynamisme. "Pour la première année d'ouverture complète des restaurants post-crise sanitaire, l'activité a été très soutenue", affirme Procos. Les centres commerciaux profitent d'ailleurs de ce dynamisme globalement retrouvé. Rappelons que ces zones de consommation ont été largement impactées par la crise sanitaire et avait peiné à retrouver leur flux d'avant crise en 2021. Bonne nouvelle donc pour les acteurs implantés sur ces zones de flux : les ventes en centre commerciaux pour les commerces spécialisés ont grimpé de 16,8 % par rapport à l'année précédente.
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Et 2023 dans tout ça ?
Sans surprise, les prochains mois sont très attendus par les acteurs du commerce spécialisé et très incertains. L'environnement économique actuel "génère un redoutable effet ciseaux résultant de la baisse des volumes de ventes et de l'augmentation de tous les coûts", insiste Procos. Si l'activité reste positive en janvier (+11,5 % vs 2022) il convient de nuancer ce dynamisme en trompe-l'œil. En 2022, le mois de janvier avait enregistré une forte baisse de 11,7 % par rapport à la même période l'année précédente. Par rapport à 2019, les premières semaines de 2023 restent bien en retrait en matière d'activité (-19,5 %). Face à cette activité en baisse et dans un environnement économique très incertain, Emmanuel Le Roch, délégué général de Procos, souligne ainsi :
Jamais la mise en place d'une politique publique du commerce n'a été aussi urgente et impérative. Il n'est plus possible d'attendre.
Et ce dernier ajoute : "Il faut à la fois stopper l'hémorragie, éviter une décommercialisation suite à la multiplication de fermetures de points de vente, les défaillances de réseaux et la vacance commerciale." Procos réclame ainsi au gouvernement la mise en place de moyens réels pour un plan dédié au commerce. Côté bailleurs, la fédération appelle à une prise de conscience et est dans l'attente d'un plafonnement des loyers pour 2023. "Les bailleurs doivent prendre conscience que continuer à laisser les loyers augmenter aujourd'hui par l'indexation ou lors de la fixation du loyer, lors des renouvellements par exemple, est mortifère. La difficulté d'un magasin, de deux, puis trois, entraîne le réseau. Plafonner les loyers 2023 de tous les magasins est une solution simple pour faire face au court terme. Mettons-là en place", conclut Procos. Sans nul doute, les prochains mois risquent d'être encore une fois très préoccupants pour le commerce spécialisé.