Dans le cadre de votre vie entrepreneuriale, vous pouvez avoir envie de vous développer et de donner ainsi une nouvelle dimension à votre entreprise. La franchise peut être un vrai accélérateur et vous aider à amorcer votre expansion. Mais attention, devenir franchiseur ne s'improvise pas…
Se développer, oui, mais comment ? C'est sûrement la question que vous vous posez en tant qu'entrepreneurs ou que vous vous poserez durant votre parcours entrepreneurial. Pour donner une autre envergure à votre entreprise, il existe plusieurs moyens. Vous pouvez vous diversifier en proposant une nouvelle offre ou en ouvrant un autre point de vente. Le faire en propre nécessite une assise financière parfois conséquente. Pourquoi donc ne pas miser sur le modèle de la franchise pour vous développer ? Si cette voie vous séduit, vous vous êtes peut-être rendu au salon Franchise Expo Paris qui s'est tenu la semaine dernière. Si cela n'est pas le cas, on vous détaille quelques conseils pour bien appréhender votre nouveau rôle de franchiseur. Car cela ne s'improvise pas, bien au contraire. "La première chose à se demander est simple : est-ce qu'il y a un vrai concept à développer ?", souligne d'emblée Cécile Peskine, avocat au sein du cabinet Linkéa avant d'ajouter :
Cela implique trois éléments forts : une marque ou une enseigne, un concept architectural et commercial fort mais également un savoir-faire précis.
Si la loi ne prévoit rien sur le sujet, il est également recommandé d'avoir préalablement testé le concept que vous souhaitez déployer, qu'il nécessite un point de vente physique ou non. "Il faut s'assurer que le modèle que vous souhaitez développer en franchise fonctionne bien et affiche une certaine pérennité", souligne Boris Flèche, responsable du développement et de la formation au sein de la Fédération Française de la Franchise. Le code de déontologie de la franchise conseille par ailleurs que le futur franchiseur doit avoir exploité et éprouvé son concept pendant au moins un an, avec une unité pilote. "Ce sont des règles de bonnes pratiques. Cela a son intérêt car la franchise c'est la duplication d'un concept et il est nécessaire de s'assurer que celui-ci fonctionnera dans les mains de quelqu'un d'autre", insiste Boris Flèche.
L'importance du savoir-faire
L'un des points essentiels quand on souhaite développer son concept en franchise est d'être en mesure de transmettre un savoir-faire précis. Un aspect qui peut être délicat à bien le formaliser. "La plupart des savoir-faire transmis par les enseignes sont un assemblages de différentes spécificités qui, pris isolément, ne semblent pas distinctives. Pour autant, si vous souhaitez amorcer un développement en franchise, vous devez déterminer ce qui vous distingue des autres", insiste Julien Siouffi, expert digital et franchise et co-fondateur de Franchise Board. Ce dernier ajoute :
Il y a toujours des facteurs distinctifs dans un concept. En restauration, par exemple, cela peut être un ingrédient secret, un approvisionnement exclusif, un savoir-faire dans la gestion du personnel…
Autre question importante à laquelle il vous faut répondre : votre savoir-faire est-il facilement transmissible ? Cela implique de bien déterminer si votre concept nécessite des prérequis importants. "Certaines activités demandent un diplôme ou une certification. C'est le cas dans le secteur de l'optique ou celui de la petite enfance. Il est donc essentiel de s'assurer que cela n'entrave pas la transmission de votre savoir-faire", affirme Boris Flèche. Bien déterminer si votre concept est franchisable passe également par la question de la notoriété de votre enseigne. Près de 2 000 réseaux se développent en France, tous ne sont évidemment pas connus au niveau national. Pour autant, vous devez être en mesure de savoir ce qui séduit votre clientèle. Julien Siouffi souligne :
Souvent, les franchiseurs se demandent, quand leur marque n'est pas connue, s'ils peuvent se développer en franchise. La notoriété est un facteur de réussite supplémentaire. Mais cela ne fait pas tout.
Et l'expert digital et franchise assure : "Avant la notoriété, ce qui est important ce sont les signes de ralliement de la clientèle, comme l'existence d'un logo, d'une signalétique forte, correspondant à l'univers de la marque."
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Changement de posture
Outre ces aspects importants, il est également de bon ton de vous interroger sur votre posture entrepreneuriale. Et votre capacité à laisser votre marque dans les mains d'une personne tierce. "C'est très particulier de devenir franchiseur. Il faut accepter de concevoir un concept qui va être réitérer par quelqu'un d'autre", insiste Sylvain Bartolomeu, dirigeant associé du cabinet Franchise Management. Et ce dernier précise :
Le style de management est également différent et moins vertical car vous travaillerez avec des patrons. Tout repose sur la co-construction et l'intelligence collective.
Les experts que nous avons interrogés sont unanimes. Tous les entrepreneurs ne sont pas faits pour devenir franchiseur. "C'est avant tout un état d'esprit. Vous pouvez avoir un bon concept avec un beau potentiel de développement, mais si vous n'avez pas un état d'esprit et des valeurs qui vont dans le sens du collectif et du partage, cela ne fonctionnera pas", estime Boris Flèche. Même discours du côté de Cécile Peskine. L'avocat au sein du cabinet Linkea développe ainsi : "Pour être un bon franchiseur, il faut avoir le goût de la relation humaine et être en mesure de bâtir un lien de confiance avec ses franchisés." Un nouveau métier que vous devez être capable d'appréhender et dont il faut prendre conscience de toutes les subtilités. "Devenir franchiseur c'est passer du 'faire' au 'faire faire', affirme quant à lui Julien Siouffi. Certains entrepreneurs ont des prédispositions pour y arriver. Pour d'autres, c'est clairement une nouvelle posture avec de nouveaux fonctionnements. D'où la nécessité de se faire accompagner."
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Quid des premiers franchisés ?
En effet, comme dans toutes les étapes de votre aventure entrepreneuriale, il est important de ne pas négliger les conseils extérieurs qui pourront vous épauler. Que cela soit dans la structuration de votre futur réseau ou dans le recrutement de vos premiers franchisés, l'accompagnement est l'une des clés de réussite. Plusieurs types d'experts peuvent vous accompagner : expert-comptable, juriste, avocat, professionnels de la communication… "Les conseils juridiques sont indispensables pour bien rédiger son contrat et son DIP. Cela ne veut pas dire que c'est la première chose à faire. Mais il est essentiel de se faire accompagner sur ce point", insiste Boris Flèche. Sylvain Bartolomeu ajoute de son côté : "Il y a plusieurs compétences transversales à solliciter et qui vous aideront à construire votre projet de développement en franchise en toute sérénité." Bien s'entourer c'est également bien recruter ses premiers franchisés. Car n'oubliez pas, les premiers membres du réseau, les pionniers comme on les appelle, seront vos meilleurs ambassadeurs. Boris Flèche assure :
La sélection des franchisés est l'un des facteurs clés d'un réseau de franchise. La vigilance est accrue sur les premiers profils que vous sélectionnerez car ils essuieront les plâtres.
Dans votre choix, assurez-vous que les premiers membres de votre réseau seront capables de se lancer avec un franchiseur qui débute. Aussi, déterminez si les premiers profils que vous recevrez correspondent bien à la cible que vous visiez. "Il ne faut pas se laisser emporter par les sirènes des demandes entrantes. Bien choisir ses franchisés nécessite plusieurs rencontres, des journées découvertes… prenez le temps de bien le connaître. Il n'y a pas de période d'essai en franchise !", assure Cécile Peskine.
Attention à la précipitation !
Enfin, l'un des enseignements que vous devez conserver à l'esprit reste de ne pas vous précipiter. Devenir franchiseur se fait sur la durée. Posez-vous donc toutes les bonnes questions avant de passer le cap. "Devenir franchiseur reste un projet sur le long terme. Cela demande un temps de préparation et d'incubation. Cela pose également la question de l'investissement financier nécessaire", détaille Sylvain Bartolomeu. "Vous aurez besoin d'un minimum de financements pour payer les conseils, communiquer sur votre développement mais aussi supporter les charges inhérentes à la structure du franchiseur (animateur, développeur, etc.)", ajoute quant à lui Boris Flèche. Et ce dernier précise :
Ne faites pas l'erreur de vous précipiter. Il vaut mieux prendre le temps et bien préparer son projet pour construire votre réseau sur des bases solides.
Plus qu'un investissement financier, amorcer le développement en franchise demande un réel investissement humain. Surtout que vous devrez continuer à vous consacrer aux sujets opérationnels afin de faire tourner vos points de vente pilotes. "D'où l'importance de se faire accompagner par des conseils extérieurs. Tout le temps que vous consacrerez à la constitution de votre réseau, vous ne serez pas dans l'opérationnel. Cela demande donc une réelle anticipation", conclut Cécile Peskine.