Pendant longtemps, les municipalités n'étaient pas forcément enclines à accueillir des enseignes nationales dans leurs centres-villes. En quête de différenciation constante, les élus privilégiaient des commerces sans enseigne. Mais, dans une démarche de redynamisation des cœurs de villes, les municipalités semblent plus ouvertes à la franchise.
Et si la franchise était le moyen de redynamiser les centres-villes ? Depuis quelques années, on le voit, les actions sont de plus en plus nombreuses pour redonner vie aux centres-villes, notamment pour les petites et moyennes agglomérations. Avec la Covid-19 et les confinements, les Français ont par ailleurs pris conscience de l'importance de la proximité. Comme en témoigne, Pierre Creuzet, directeur et fondateur de Centre-ville en Mouvement.
Il y a eu énormément de changements. Aujourd'hui, les Français restent fortement attachés à leur centre-ville. Selon notre baromètre, 72 % d'entre eux considèrent le centre-ville comme un lieu indispensable.
Périphérie vs centre-ville
Dans ce contexte, les porteurs de projet peuvent donc plus facilement s'orienter vers les emplacements de centre-ville, perçus comme de plus en plus porteurs. Mais les franchises sont-elles pour autant bien accueillies par les municipalités ? "L'idée reçue selon laquelle ce sont les mêmes enseignes qui se développent de la même manière partout persiste, concède Philippe Kratz, directeur général de l'enseigne Le Comptoir de Mathilde. Et ce dernier ajoute :
Mais on apporte du commerce de proximité et une façon de travailler, un savoir-faire et un support aux futurs commerçants. J'espère qu'il y aura une prise de conscience.
Historiquement, il y a toujours eu une opposition entre les cœurs de villes et les zones commerciales de périphérie. Même s'il existe des concepts se développant depuis toujours en centre-ville, les franchisés se sont plus naturellement implantés sur des points de vente en centres commerciaux ou en zone péri-urbaines, perçues pendant longtemps comme les emplacements idéaux pour capter du flux. "Il y a encore cette dichotomie sur certaines zones géographiques où généralement les commerces sous enseigne restent cantonnés à la périphérie. C'est assez flagrant dans des territoires qui ont une identité forte comme le Pays Basque", souligne Nicolas Louis-Amédée, directeur du développement au sein du cabinet de géomarketing Territoires et Marketing. Un constat en effet partagé par Jean-Sébastien Halty, directeur d'Hendaye tourisme & commerce. Ce dernier remarque en effet que peu d'enseignes nationales sont présentes en centre-ville. "Et c'est en effet lié à la culture locale. À Hendaye, nous accueillons les enseignes. Ce qui compte pour nous c'est que le porteur de projet, apporte un service, un produit ou autre concept que nous n'avons pas ou peu sur l'agglomération. La pertinence du projet par rapport au reste du territoire est importante", insiste-t-il.
Lire aussi :
| Corners, magasins éphémères... ces nouveaux formats performent-ils ?
Attirer les clients
Alors, les choses ont-elles vraiment changées ? Est-ce que les municipalités sont plus enclines à accueillir des enseignes, en succursale ou en franchise, dans leurs rues commerçantes ? Selon Christophe Baraton, délégué général du Club de Managers de Ville et de Territoire, la réponse n'est pas si évidente. "Je ne sais pas si cela a vraiment évolué. Une chose est sûre : aucun élu ne veut le même centre-ville qu'ailleurs et tous veulent développer des savoir-faire, insiste-t-il, avant d'ajouter :
Mais tous ont également conscience que pour faire venir les clients, il faut des concepts 'locomotives' dans les rues commerçantes. Ce qui n'est possible qu'avec des enseignes.
Pour Pierre Creuzet, les villes moyennes, en particulier, recherchent des concepts porteurs et connus pour faire revenir les clients en centre-ville. "Les grandes villes ont trop d'enseignes, mais les agglomérations plus petites en ont moins. Et elles cherchent à étoffer leur offre. Les avantages sont là : la clientèle est prête à se déplacer de plus loin pour venir dans ces centres-villes qui proposent une diversité de magasins. Cela permet aussi de rajeunir la clientèle." Et les enseignes l'ont bien compris. Elles sont de plus en plus nombreuses à ne plus viser uniquement les grosses agglomérations mais à s'intéresser aussi à ces villes dites moyennes. "On touche une clientèle de proximité qui ont véritablement envie de défendre une enseigne de proximité, confirme Philippe Kratz, avant de préciser :
Mais cela n'a du sens que si l'acteur est local, et donc si c'est un franchisé qui s'implante. En succursale, on est beaucoup trop lointain.
Changement de perception
Si l'on écoute nos différents interlocuteurs, c'est d'ailleurs l'un des aspects qui a longtemps été incompris ou négligé de la part des élus frileux à accueillir des enseignes dans leurs cœurs de ville. Christophe Baraston précise alors : "Les municipalités veulent des indépendants dans les commerces de centre-ville. Mais ils n'ont pas forcément en tête que les franchisés sont des chefs d'entreprise indépendants. On travaille sur ces questions-là, avec différentes fédérations comme la Fédération française de la Franchise ou encore Procos." Un avis partagé par Nicolas Louis-Amédée. "Il y a toujours cette vision erronée et négative de la franchise et du commerce organisé. On a toujours tendance à croise qu'une enseigne ne se développe qu'en succursale et qu'un franchisé n'est pas un commerçant indépendant. Or c'est faux, précise-t-il, avant d'ajouter.
Heureusement cela évolue. On le voit bien avec le poids et la vitesse de création de commerces sous enseigne, qui prend de l'ampleur.
Un changement de perception de la part des élus que constate également Christophe Baraston. Ce dernier conclut ainsi : "Cela s'explique. Les grands projets commerciaux de périphérie ont moins le vent en poupe et il y a encore beaucoup de vacance commerciale dans certains cœurs de ville." Alors, futurs franchisés, si vous visez un emplacement en centre-ville pour votre projet, pas de panique. Comme vous le voyez, les municipalités connaissent de mieux en mieux le modèle de la franchise. Assurez-vous également d'avoir une offre peu ou pas représentée sur le territoire visé et rapprochez-vous du manager de centre-ville pour vous faire accompagner.