Franchisés, quelle indépendance pour recruter vos salariés ?

Camille Boulate

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Franchisés, quelle indépendance pour recruter vos salariés ?

En tant que franchisé, vous pouvez vous interroger sur votre indépendance et notamment en matière de recrutement. Si la tête de réseau peut vous épauler sur cet aspect clé de votre activité, vous devez rester maître des décisions. On fait le point.

Dans votre nouvelle activité de chef d'entreprise, vous serez probablement amené à recruter des salariés. Si vous avez fait le choix de la franchise, la question peut se poser de votre indépendance en matière de recrutement. Ayez à l'esprit que, en tant que franchisé, vous restez un chef d'entreprise indépendant et que recruter des salariés sera de votre ressort. "Cela relève du seul pouvoir du franchisé, en toute indépendance. Car c'est en son nom que va être conclut le contrat de travail", souligne Clémence Casanova, avocat au sein du cabinet Linkea. Un avis partagé par Agnès Parent, directrice juridique au sein de la Fédération Française de la Franchise (FFF) :

Toutes les questions liées au droit du travail et aux ressources humaines appartiennent au franchisé.

Pour autant, si vous êtes libres de recruter qui vous souhaitez en totale indépendance, la tête de réseau peut vous conseiller et vous épauler. C'est d'ailleurs là toute l'essence de la franchise : bénéficier d'un accompagnement continu sur tous les aspects de la vie de chef d'entreprise. Un accompagnement qui peut-être plus ou moins renforcé selon les réseaux. "Cela peut être un simple conseil sur les profils ou le nombre de salariés à embaucher", insiste Clémence Casanova, avant d'admettre :

Mais bien souvent, les franchiseurs vont bien plus loin en détaillant des fiches de postes dans le manuel opératoire permettant de déterminer les profils de collaborateurs à recruter.

Et l'avocate explique que, sur certains postes clés pour l'activité du franchisé, la tête de réseau peut même être amenée à donner son avis sur les candidats reçus en entretien. "Cela peut arriver sur des fonctions de managers ou de responsables d'exploitation, sur lesquelles le franchisé doit encore moins se tromper pour la réussite de son activité. Mais cela doit rester un avis consultatif du franchiseur", alerte Clémence Casanova.

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Attention à l'ingérence !

Si un soutien de votre tête de réseau est bienvenu, soyez attentif toutefois à ce que la décision finale vous revienne. "Dans un monde idéal, le franchiseur laisse son franchisé recruter en toute indépendance, sans donner son avis. Sur le terrain cela n'est pas toujours le cas", concède Agnès Parent. Certains franchiseurs, souhaitant bien faire, s'impliquent parfois trop dans le processus de recrutement des futurs salariés de ses franchisés. "Il peut arriver que des têtes de réseau communiquent un modèle de contrat de travail, par exemple. Ce qui est, à mon sens, un peu trop engageant pour le franchiseur", confie Clémence Casanova, avant de conseiller :

Dans ce cas, le franchisé doit vraiment s'assurer que le contrat réponde parfaitement à la réglementation et est en accord avec ce qu'il souhaite proposer aux futurs employés.

Une trop grande implication du franchiseur peut donc s'avérer dangereux. En tant que franchisé, vous pouvez ne pas vous sentir libre de vos choix, ne pas recruter la personne qui correspond le mieux, à vos yeux, au poste mais aussi à votre style de management. À terme, cela peut impacter votre activité et vos performances économiques. En tant que franchiseur, trop s'immiscer dans le choix des membres du réseau peut également entraîner des difficultés, comme de fortes dissensions avec vos franchisés. Comme en témoigne Agnès Parent :

C'est un sujet extrêmement sensible. Si jamais le franchiseur s'immisce trop, le franchisé peut, à terme, demander la requalification de son contrat de franchise en contrat de travail ou de gérant de succursale.

Et la directrice juridique de la FFF ajoute : "En tant que fédération, on n'est clairement pas favorable à ce qu'un franchiseur communique un modèle de contrat de travail, par exemple. La bonne pratique reste de renvoyer son franchisé vers un expert-comptable ou un avocat."

"Nos concessionnaires s'aperçoivent qu'il faut être très réactifs"

Réseau spécialisé dans la production et l'installation de cheminée, d'inserts et de poêles à bois, Turbo Fonte accompagne ses concessionnaires dans le recrutement de leurs salariés. Pour cela, l'enseigne a déployé un service dédié afin d'aider au mieux ses partenaires. "Nous avons un chargé de recrutement, présent au siège, qui s'occupe de publier les annonces, de faire une pré-sélection des CV et de réaliser un premier contact avec le candidat", détaille Marc Labattu, PDG de l'enseigne. Pour Turbo Fonte, ce service optionnel a avant tout été pensé pour faire gagner du temps à ses concessionnaires. "Ils s'aperçoivent qu'il faut être très réactifs dans le recrutement. Et souvent, ils n'ont pas le temps et sont pris par l'activité opérationnelle de leur point de vente. Notre chargé de recrutement connaît leur planning et sera en mesure de faire un premier tri dans les CV et d'ainsi caler les entretiens", insiste Marc Labattu. Quand on l'interroge sur son implication, en tant que tête de réseau dans les recrutements des salariés des ses concessionnaires, ce dernier répond sans détours : "Le sujet de l'indépendance, pour nos concessionnaires, est important. 80 % d'entre eux sont d'anciens salariés et veulent désormais prendre les décisions. Mais ils s'aperçoivent que le recrutement reste un sujet nouveau, parfois compliqué, et ils souhaitent être accompagnés. Ce que nous faisons. Mais, quoiqu'il en soit, c'est à eux que revient la décision du recrutement", assure Marc Labattu.

Trouver le juste milieu

Dans un contexte économique chahuté et marqué par les difficultés de recrutement, toutes les initiatives sont pour autant bonnes à prendre. Et un réseau qui ne proposerait pas de soutien ou d'accompagnement sur ce point-là pourrait être justement critiqué voire attaqué par ses franchisés pour son manque d'implication. "En crise d'emploi comme nous le vivons actuellement, en effet, les questions à propos du recrutement sont de plus en plus nombreuses. Les franchisés attendent que le franchiseur les accompagne", admet Agnès Parent. Un avis partagé par Clémence Casanova : "Les franchisés sont clairement en demande de soutien de la part de leur tête de réseau. Cela les rassure, voire les soulage, de voir qu'ils ne sont pas seuls et qu'on peut les aider." Mais un leitmotiv doit rester en tête, tant du côté du franchisé que de la tête de réseau : un franchiseur doit conseiller mais jamais imposer un profil à recruter. Agnès Parent assure ainsi :

Il y a une différence entre accompagnement et ingérence. Sur des secteurs très touchés par la pénurie de main d'œuvre, les réseaux peuvent être tentés d'être plus présents sur ces questions-là. Il faut toutefois rester vigilant et ne pas trop s'impliquer.

Un juste milieu qui peut parfois être difficile à trouver et qui reste un vrai exercice d'équilibriste. Parmi les initiatives notables déployées par les réseaux, on peut notamment citer la publication des annonces à pourvoir sur un seul et même site Internet géré par l'enseigne, la mutualisation des CV reçus au niveau du siège ou la mise en place de réunions et de groupes de travail pour échanger sur les bonnes pratiques pour recruter… Aussi, l'un des rôles majeurs de l'enseigne sera de booster sa notoriété. "Travailler sa marque employeur, en tant que franchiseur, est primordial. Cela sert à la fois la tête de réseau mais aussi les franchisés", insiste Agnès Parent, avec de préciser :

Certaines enseignes interviennent dans des écoles ou centres de formation. C'est une bonne pratique à ne pas négliger pour se faire connaître et valoriser son réseau.

Autre point important : la capacité de l'enseigne à proposer des formations tant pour ses franchisés que ses salariés. Nombreux sont les franchiseurs à bénéficier d'un centre de formations et à faire bénéficier les salariés de leurs partenaires franchisés. "Cela est très fréquent, notamment sur certaines fonctions clés. Cela permet d’éviter la déperdition du savoir-faire", insiste Clémence Casanova. "C'est un bon moyen de capter des talents mais aussi de les fidéliser", conclut Agnès Parent.

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