Kader Jawneh (Afrik'n'Fusion) : "La défaite fait partie de la réussite d'un entrepreneur"

Camille Boulate
Kader Jawneh (Afrik'n'Fusion) :

© De gauche à droite : Audray Tuzolana, Kader Jawneh et Sidiba Doucouré

Après plusieurs expériences entrepreneuriales, Kader Jawneh se lance dans la création d'Afrik'n'Fusion, spécialisée dans la restauration fast-casual africaine. Avec ses associés, l'entrepreneur a ouvert six points de vente et a choisi d'amorcer son développement en franchise.

Kader Jawneh a l'entrepreneuriat dans la peau. Avant de développer avec succès son enseigne Afrik'n'Fusion, il a multiplié les expériences entrepreneuriales. Dès l'âge de 18 ans, il lance sa première société, spécialisée dans le nettoyage. "Mais ce n'était pas assez fun, se souvient-il. J'ai alors créé une entreprise dédié à l'événementiel qui a bien fonctionnée. J'ai rapidement aspiré à autre chose, je me suis alors lancé dans les énergies renouvelables. C'était en 2006." Une expérience entrepreneuriale qu'il mènera pendant cinq ans, jusqu'à la création d'Afrik'n'Fusion, avec ses deux associés Audray Tuzolana et Sidiba Doucouré. "D'aussi loin que je me souvienne, je n'ai pas vraiment eu d'expérience en tant qu'employé ou salarié, souligne-t-il, avant d'assurer :

J'ai une vraie fibre entrepreneuriale. Ce qui m'amine : construire un projet de zéro et le développer.

Fougue de la jeunesse

Un CV d'entrepreneur bien remplit mais qui n'a pour autant pas été de tout repos. Des difficultés, Kader Jawneh en a connu. Mais il n'a jamais abandonné ses projets. "Quand on est jeune, le manque d'expérience peut être une vraie embûche", détaille-t-il. Le chef d'entreprise conseille alors de ne pas aller trop vite et de bien prendre en compte l'environnement ou le marché dans lequel vous souhaitez vous lancer. "La fougue de la jeunesse entraîne bien souvent de la précipitation. Or, on est vite confronté à la réalisé du terrain et au fait qu'être patron ce n'est pas si simple qu'on ne le pense, prévient-il avant de préciser :

Il ne faut pas que votre jugement d'envie dépasse celui de clairvoyance et donc prenez le temps de tout bien analyser !

Autre conseil : ne pas penser que votre jugement ou votre vision est une réalité, au risque d'aller droit dans le mur. "Cela vient aussi avec la maturité et l'expérience, insiste Kader Jawneh. L'entrepreneuriat est fait de réussites mais aussi de défaites. Et la défaite fait partie de la réussite de l'entrepreneur."

S'entourer et se former

Véritable touche à tout, Kader Jawneh n'a donc jamais hésité à entreprendre dans un domaine inconnu. Comme lorsqu'il décide de se lancer dans la restauration et de créer, avec ses deux associés, Afrik'n'Fusion. Les trois co-fondateurs, tous d'origine africaine, souhaitaient proposer des recettes traditionnelles et familiales. "Nous avons repris les recettes de nos parents, de nos tantes ou de nos grands-mères, explique Kader Jawneh. Et ce dernier d'ajouter :

Mais pour comprendre ce qu'est réellement la restauration nous nous sommes formés et nous avons sollicité des professionnels du secteur mais aussi des chefs de tous les horizons.

Mais la difficulté pour les trois associés fut de convaincre les acteurs bancaires de les suivre dans leur projet, alors qu'ils n'affichaient aucune expérience dans ce secteur activité. "Cela a été une vraie complexité, à tel point qu'aucune banque nous a suivi. Nous ne sommes pas parvenus à les rassurer, confie Kader Jawneh. Dans mon imaginaire, le rôle d'un acteur bancaire était d'épauler les entrepreneurs dans leur projet. En réalité, ils ne sont pas prêts à prendre des risques quand ils connaissent peu voire pas du tout le marché, ce qui était le cas pour la restauration africaine."

Lire aussi : 
 | Louis Frack : "Entreprendre jeune ? Un avantage concurrentiel !" 

Nouvelle enseigne

Ces refus n'ont pas découragé le chef d'entreprise et ses associés, bien au contraire. Pour financer leur premier restaurant, ouvert en 2011 dans le 20e arrondissement à Paris, ils réunissent leurs économies et sollicitent leurs proches. Au total, avec le love money, ils parviennent à réunir les 120 000 euros nécessaires pour créer leur premier point de vente. "Nous n'avions pas besoin d'un grand local pour débuter, ce qui a minimisé l'investissement, se souvient le co-fondateur d'Afrik'n'Fusion avant de confirmer :

Nous avons réduit les coûts en mettant la main à la pâte pour les travaux, en posant nous-mêmes le carrelage, par exemple.

Une ténacité qui paye. Aujourd'hui, l'enseigne compte 6 points de vente en propre, dont deux à l'étranger (Casablanca et Londres). Et Kader Jawneh ne veut pas s'arrêter là. L'entrepreneur et ses associés ont créé une nouvelle enseigne de restauration rapide durant le premier confinement, en mars 2020. Appelée Djaam, l'enseigne propose des poké bowl africains, appelé "boké", à base de fonio, igname, patate douce ou encore banane plantin. "Nous voulions extraire l'idée que la cuisine africaine est un concept lourd, gras et pimenté", insiste le co-fondateur. D'ici la fin de l'année, Djaam devrait compter 7 points de vente en activité.

D'entrepreneur à franchiseur

Et pour se développer dans les principales agglomérations de plus de 150 000 habitants, les deux réseaux portés par Kader Jawneh et ses associés misent sur la franchise. D'ici trois ans, Afrik'n'Fusion entend compter une quarantaine de points de vente opérationnels. L'enseigne Djaam, quant à elle, devrait afficher un réseau de 80 restaurants. Une nouvelle casquette de franchiseur à laquelle Kader Jawneh s'habitue petit à petit. "C'est une perception totalement différente de l'entrepreneuriat classique, concède-t-il avant de préciser :

Face à nous, on a d'autres entrepreneurs, des personnes qui ont envie d'entreprendre et de mettre leur pierre à l'édifice, même s'ils choisissent nos enseignes pour se développer.

Et le chef d'entreprise admet : il faut arriver à composer avec les membres du réseau. "Il faut parvenir à donner une ligne directrice tout en étant ouvert au fait que le franchisé peut avoir une meilleure idée que nous. C'est important de le concevoir pour mieux construire son réseau."  

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