RSE : les chefs d'entreprise se saisissent-ils du sujet ?

François Simoneschi

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RSE : les chefs d'entreprise se saisissent-ils du sujet ?

Sport, restauration, automobile : comment peut s’opérer la transformation environnementale et sociétale dans ces trois secteurs ? Témoignages de trois chefs d’entreprise, portés par un engagement sincère, proposant des initiatives parfois simples, et pas forcément coûteuses.

Olivier Garrigou (Intersport) : "La RSE, soit on s'en occupe, soit elle va s'occuper de vous !"

Possédant une douzaine de magasins au sein du groupement Intersport (fondé en 1924, distribution d’articles de sport), Olivier Garrigou, est devenu, en 2018, la 3e génération d’entrepreneurs de sa famille sous la même enseigne. Il a immédiatement enclenché la transformation environnementale et sociétale de l’entreprise, sensibilisé à cette question par sa première vie professionnelle dans l’agronomie. "Il ne s'agissait pas d’une direction supplémentaire, mais d’une même façon d’aborder toutes les dimensions de l’entreprise, y compris le développement. Nous avons ainsi réfléchi nos agrandissements de magasin dans une logique économe de l’espace. Dans la boutique historique de 3 800 m2 à Labège, nous avons ainsi alloué différemment les surfaces, en adaptant celles dédiées au parcours client ou au stockage à nos besoins, et en réduisant celles peu productives ou inutiles", indique Olivier Garrigou, avant de préciser :

Nous avons gagné 200 m2 d’espace de vente, sans augmenter ni la taille du bâtiment ni notre consommation énergétique.

Olivier Garrigou contribue également au pilotage du comité RSE du groupement, en binôme avec une permanente de la centrale, Claire Gautier-Le Boulch. "Cette forme de révolution s’opère avec l’appui de la centrale du groupement, en cohérence avec notre ancrage territorial fort et notre ADN coopératif. Par ailleurs, nous sommes conscients d’un argument fort : 'La RSE, soit on s’en occupe, soit elle va s’occuper de vous !' Le réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité impactent toute la société, notamment notre activité connectée à l’extérieur. Par une température de 45 degrés, plus de running possible !", note Olivier Garrigou. Le comité RSE Intersport traite de nombreuses problématiques comme la reprise de produits usagés ou la logistique par exemple. Le chef d'entreprise insiste :

Dans mon groupe, nous avons ainsi mis en place afin de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, une seule navette pour la livraison des marchandises et la reprise des déchets triés de la veille, qui sont ensuite recyclés.

Et pour Intersport, l’implication de toute l’entreprise est la clé de réussite. "Les indicateurs RSE, tels que la réduction de la consommation électrique de 30 % en novembre et décembre 2022 ou les 7 000 palettes et 100 tonnes de cartons triés dans nos magasins et recyclés par notre partenaire, sont suivis au même titre que la marge ou le panier moyen. Mais une température en point de vente à 18 degrés au lieu de 23, comme la tenue des rayons ou la propreté de la réserve, restent du ressort des équipes. Les amener au niveau recherché en RSE, c’est d’abord du management", reprend Olivier Garrigou. L’un des axes d’amélioration visés en matière de RSE est de prolonger la vie des produits grâce entre autres à la réparation des skis ou des vélos, et peut être demain du textile. "Plus de 350 000 actes d’entretien et de réparation sont réalisés à l’échelle nationale par l’enseigne. En 2013, Intersport a acquis la Manufacture Française du Cycle, à l’origine dans une logique business. 500 000 vélos y ont été conçus et assemblés l’an dernier, et 700 emplois ont été créés en 10 ans", affirme Olivier Garrigou, avant d'ajouter :

En tant que distributeur, nous pouvons agir sur la relocalisation de la production. La RSE ne coûte pas forcément cher.

Et le chef d'entreprise conclut : "On peut déjà commencer par ce qui rapporte de l’argent dans la durée, comme un changement de matériel électrique moins consommateur."

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Carine Drouard (La Mie Câline) : "Nos apprentis sont encouragés par la progression des autres salariés"

Franchisée La Mie Câline à Pontivy (Morbihan) avec son mari, Carine Drouard, formatrice dans l’âme, s’est particulièrement engagée dans la partie sociale de la RSE. Si, durant les trois premières années d’activité, elle n’a pas embauché, elle compte aujourd’hui 14 collaborateurs dans son entreprise, plus de vingt ans après sa création, en exploitant le concept avec des places assises. "L’apprentissage sur le terrain demeure, à mon sens, la meilleure des formations, notamment pour ceux qui n’ont pas pu mener des études. J’ai mis en place un tutorat, s’adaptant aux compétences de l’apprenti, et lui accordant des responsabilités en fonction du niveau exprimé. Je peux, par exemple, choisir de davantage le former sur la relation commerciale, en lui ajoutant des challenges de ventes", assure-t-elle. Et la franchisée ajoute :

Nous avons ainsi intégré des étudiants pour le week-end, ce qui me permet de donner ces jours à mes salariés en CDI. Les congés payés sont anticipés plusieurs mois à l’avance, pour que chacun puisse en profiter, ce qui n’est pourtant pas simple dans le secteur de la restauration.

Elle explique être avant tout à l'écoute de son équipe. "Et notamment de leurs idées pour améliorer notre organisation, dans le cadre d’un management collaboratif. Cela génère une certaine reconnaissance des salariés, qui se traduit notamment par des salariés parfois présents depuis nos débuts dans l’activité", souligne Carine Drouard. La chef d’entreprise s’est également intéressée au public défavorisé sur le marché de l’emploi. Tout d’abord, en employant, durant six ans, des personnes en situation de handicap mental à travers une association spécialisée, deux heures par jour sur des tâches simples. Puis, depuis 2019, par l’intermédiaire d’une association d’accueil d’étrangers majeurs, qui ont quitté leur pays, de gré ou de force. Carine Drouard explique :

Avec la barrière de la langue, on a créé des fiches avec la photo du produit pour expliquer les mots en français. Hassan, venu du Bangladesh, est aujourd’hui en CDI

Et la franchisée assure : "Nos apprentis sont encouragés par la progression des autres salariés, parvenus à l’autonomie malgré leurs difficultés initiales. Et ce, également grâce au soutien de l’ensemble des collaborateurs, qu’il faut d’abord convaincre du bien-fondé de la démarche, et qui doivent en percevoir les bénéfices une fois la personne complètement formée, notamment au niveau du planning. Il faut rester patient, car la fleur peut s’ouvrir d’un coup, bien que gênée au départ par le bruit ou la vitesse d’exécution." L’action sociale ne se limite pas strictement au professionnel, de même que l’environnemental est également pris en compte par ce terminal de cuisson et de pâtisserie. "Nos apprentis, qui ne sont pas forcément que des étrangers, sont également accompagnés dans leur démarche sociale, pour obtenir la CAF, ou encore la CMU en attendant que notre mutuelle puisse les couvrir. Tous nos salariés bénéficient d’un plan d’épargne entreprise", souligne la franchisée.

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Au niveau environnemental, Carie Drouard travaille également à diminuer sa consommation d'énergie, même si le concept La Mie Câline est fondé sur le "manger chaud". "Nous utilisons des produits d’entretien éco-responsables ou remettons nos invendus à des associations locales", explique la franchisée, avant d'ajouter :

Si j’ai été facilitatrice pour mes salariés, notre communauté de communes l’a aussi été pour nous, consommateurs, en simplifiant le tri sur son territoire avec des colonnes enterrées en centre-ville.

Christophe Cadier (Sécuritest) : "Pour mes entreprises, l’effet RSE se poursuit jusqu’à la qualité de nos prestations"

Issu d’une famille d’entrepreneurs (restauration, travaux publics, transports), d’abord salarié dans le monde concurrentiel de l’automobile, Christophe Cadier, dirigeant de 3 centres de contrôle technique Sécuritest, a également profité de son accession à l’entrepreneuriat pour s’impliquer dans la Responsabilité Sociétale des Entreprises. Et ce, dès la construction de son premier bâtiment commercial à Couhé (Vienne) en 2018. Le franchisé explique ainsi :

Nous avons appliqué les mêmes principes de conception que pour une maison individuelle, fondée sur la RT 2012, au regard de notre activité.

Par exemple, le chef d'entreprise a fait en sorte que les fenêtres panoramiques soient orientées plein sud, pour un maximum de luminosité durant les contrôles, avec un système de climatisation naturelle régulant la température l’été, pour éviter une "fournaise" non désirée par les clients mais aussi les collaborateurs. "Nous avons construit des fosses pour que l’opérateur descende réaliser l’examen du véhicule, avec un minimum d’électricité pour devoir lever le pont. Ou encore, notre système d’enseignes est déterminé par une horloge, qui l’éteint la nuit et le week-end", explique Christophe Cadier.

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La nouvelle génération de bâtiments Sécuritest été imaginée par Laurent Palmier, président de l’enseigne, et David Taride, architecte, pour consommer jusqu’à 30 % d’énergie en moins : limitation des trajets de véhicule, éclairage LED avec détecteur de présence, isolation des murs, etc. Sous l’impulsion de Fabienne Valais, responsable RSE chez Sécuritest, un cahier des charges a été également créé pour la refonte des sites existants. Ce qu’a mis en œuvre Christophe Cadier pour les deux centres de l’enseigne qu’il a repris par la suite. "Outre le changement de l’éclairage, nous avons ainsi repeint la toiture en blanc, ce qui génère 8 degrés de moins l’été, ou remplacé le système de chauffage avec des radiateurs à inertie", souligne-t-il, avant de se réjouir :

Résultats : 15 % d’électricité en moins consommée, un gain de 30 % sur le chauffage. Notre investissement sur le luminaire sera ainsi rentable au bout de 7 ans.

Avant d’indiquer : "D’une manière générale, cette amélioration continue est intégrée à notre prévisionnel pour devenir, étapes par étapes, autonomes à 100 %." Cette politique RSE impacte les collaborateurs du chef d’entreprise, premiers acteurs de cette transformation énergétique, et génère globalement des effets positifs. "Par l’intermédiaire de Génération Responsable, nous avons obtenu un carnet de route, pour prendre conscience et déterminer des axes d’amélioration. Nous avons ainsi écrit ce que nous réalisions de positif au quotidien sans nous en rendre compte, ce qui a favorisé la contribution de l’équipe salariée", explique-t-il, avant de préciser :

Notre démarche RSE provoque même des déclics : un de nos contrôleurs technique s’est mis à organiser une collecte de cartons pour son association de parents d’élèves.

Membre d'une association de commerçant, le franchisé assure s'impliquer et s'être engagé dans un projet de réaménagement du centre-ville d'une des zones où il est implanté. Et le chef d'entreprise insiste : "Pour mes entreprises, l’effet RSE se poursuit jusqu’à la qualité de nos prestations, l’équipe bénéficiant d’un confort de travail. Les avis de consommateurs nous attribuent une note de 4,9 sur 5 pour plus de 500 avis. Tout est lié !"

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